Camus, Delteil, la lueur de l’âme !

Dans son essai «Camus Delteil, la philosophie attrapée par les cornes», Jean-Louis Malves nous plonge avec gourmandise dans l’univers de ces deux écrivains anti-conformistes et profondément humanistes.

© RLA l’heure du prêt à penser, de l’urgence du temps et de la résurgence du populisme, le nouvel essai « Camus – Delteil, La philosophie attrapée par les cornes » de Jean-Louis Malves sonne comme une réjouissante invitation à entrouvrir la « porte étroite du bonheur ». Depuis une photo tombée dans l’oubli, l’auteur et spécialiste de Joseph Delteil s’attache à raviver la rencontre qui eut lieu à la Tuilerie de Massane, entre deux écrivains hors normes et à la sensibilité si proche.

© DRDes enfants du soleil

Jean-Louis Malves nous plonge rapidement dans l’univers et les pensées d’Albert Camus tout en établissant de subtils liens avec le parcours de Joseph Delteil. Les similitudes, Camus et Delteil semblent les cultiver, dès l’enfance. Enfants du soleil, Camus naît en Algérie, Delteil près de Carcassonne, tous deux sont issus d’un milieu très modeste et furent frappés jeunes par la tuberculose. Ils restèrent très attachés à leur terre natale, jusqu’à l’idéaliser.

Adulés puis reniés

Leurs parcours littéraires présentent là encore des similitudes, tous deux subissant les attaques du gratin littéraire et philosophique de l’époque… Présent à Paris dans les années 20, Delteil se fait rapidement remarquer et adopter par les surréalistes André Breton, Paul Eluard et Louis Aragon mais la parution de son ouvrage « Jeanne d’Arc » en 1925 lui vaudra ensuite leur profonde inimitié… Résistant, engagé à gauche, c’est avec Sartre et ses amis du courant existentialiste que Camus consomme la rupture dans les années 50 lorsqu’il dénonce le totalitarisme soviétique et le communisme. Affranchis de ces courants, les deux écrivains défendront leur liberté d’être et de penser.

Engagés et libres

© DR

Car le véritable trait commun entre Camus et Delteil provient à n'en pas douter de leur humanité et de la façon dont tous deux n’eurent de cesse d’entrouvrir « la porte étroite du bonheur », le seul problème philosophique sérieux aux yeux de Camus. Camus parvient à trouver la clé de cette ultime serrure au fil de ses réflexions et d’une œuvre magistrale construite autour de trois cycles : l’absurde, la révolte et enfin l’amour. Dans sa quête, Delteil déclare pour sa part qu'il n'existe que deux façons de refuser le monde tel qu'il est : soit on le change à la façon de Karl Marx et bien d'autres illuminés soit « on change de monde », tranquillement, en toute modestie à la manière de François d'Assise, pacifiquement, dans sa tête et dans son coeur. « Pourquoi changer le monde, des millions d'homme, quand il me suffit d'en changer un seul : moi-même » déclare t-il. A ses dires, « le bonheur, c’est le mot de la fin ».

Camus et Delteil se retrouvent dans de nombreux combats, contre la peine de mort ou encore l’arme nucléaire quand ils sont les seuls intellectuels français à s’insurger contre la bombe d’Hiroshima. Tous deux s’accordent enfin sur l’importance de donner la primeur à la Nature, plutôt qu’à l’Histoire, s’affirmant comme des écologistes avant l’heure…

Une complicité évidente

© DR

Durement affecté par une pleurésie tuberculeuse, la maladie du pauvre, Delteil décide de s’installer en 1937 près de Montpellier, à la Tuilerie de Massane et de devenir paysan écrivain. Il vivra jusqu’à sa mort en compagnie de sa femme, Caroline Dudley, tout en entretenant de solides amitiés avec de nombreux artistes et écrivains dont Georges Brassens et Henri Miller. La Deltheillerie qu’il publie en 1968 redonne un peu de notoriété à ce « surréaliste en sabots et héritier de Rabelais», fervent admirateur de Rousseau.

La rencontre Camus Delteil n’a donc rien de fortuite et comme le souligne Jean-Louis Malves, on ne saura jamais ce que les deux écrivains souriants et détendus sur la photo ont pu se dire à la Tuilerie de Massane. « Cependant ce document suffit à témoigner de l’estime et de la considération qu’Albert Camus, se montrant très déférent, pouvait avoir pour son aîné Joseph Delteil ».

Un vibrant hommage

Au travers de cet essai riche en références et fort plaisant à lire, Jean-Louis Malves mêne également sa propre quête, celle de contribuer à donner à Delteil la place qu’il mérite. D’autres que lui abondent en ce sens. Jacques Chancel qui reçut le paysan écrivain pour le Grand Echiquier dit de lui : « Pour peu que l’écriture sache résister à l’Internet, Joseph Delteil sera célèbre dans 100 ans. … Ceux pour lesquels on dresse des arcs de triomphe éphémères seront vite oubliés. Joseph, lui, restera ». Son ami Camus aussi, assurément ! 

 

« Camus – Delteil, La philosophie attrapée par les cornes » de Jean-Louis Malves

Paru aux éditions Domens

Prix : 17€

 

Joseph Delteil : écrivain et poète français né le 20 avril 1894 à Villar-en-Val dans l'Aude et mort le 16 avril 1978 à Grabels dans l'Hérault.

 

Albert Camus : écrivain philosophe et romancier français né le 7 novembre 1913 à Mondovi (aujourd’hui Dréan), près de Bône (aujourd’hui Annaba), en Algérie, et mort le 4 janvier 1960 à Villeblevin, dans l'Yonne.

 

Jean-Louis Malves, ami et proche de Delteil

© NDB

Jean-Louis Malves est né en 1947 dans l'Aude, la terre de Joseph Delteil. Il a vécu trois ans, en qualité de coopérant, à Alger, la ville d'Albert Camus. Après ses études universitaires à Toulouse, il a effectué une carrière de cadre supérieur, dans la capitale, en métropole et outre-mer, dans la fonction publique d'Etat. Il est déjà l'auteur de quatre ouvrages dont "Delteil en habit de lumière" (1992) et "Delteil Soleil" (2013), autour de la vie et l'oeuvre de Joseph Delteil. 

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