Pour en finir avec le chômage !

Dans son essai « Sans emploi, condition de l’homme postindustriel » le sociologue Raphaël Liogier livre un vibrant plaidoyer pour en finir avec l’obsession du travail et le chômage. Au cœur du dispositif, un revenu universel de haut niveau.

Au début des années 90, un grand penseur de l’écologie politique, André Gortz, écrivait : L’économie n’a pas pour tâche de donner du travail, de créer de l’emploi. Sa mission est de mettre en œuvre aussi efficacement que possible les facteurs de production, c’est à dire de créer le maximum de richesses avec le moins possible de ressources naturelles, de capital et de travail.

Le chômage, un faux problème

S’appuyant sur ce paradigme, le sociologue Raphaël Liogier vient de se fendre d’un essai qui bouscule et laisse entrevoir l’évolution possible de notre condition dans l’ère postindustrielle que nous traversons. Volontairement provocateur, il n’hésite pas à écrire « Il n’y a pas de solution au problème du chômage pour la simple et bonne raison qu’il n’y a pas de problème ».

Pour étayer ses propos, l’auteur s’attache à rappeler que depuis la fin des trente glorieuses, nous assistons aux échecs successifs des politiques qui s’obstinent aveuglément à vouloir restaurer le plein emploi. « Tous refusent d’accepter l’irrésistible réalité de la réduction progressive de la part du travail humain dans le système de production » explique t-il.

Le plein emploi appartient au passé

Comme l’écrit fort justement le journaliste Jean-Marie Durand dans les Inrocks à propos de cet ouvrage, nier que le chômage est un problème a de quoi faire hurler des millions de personnes accrochées à l’espoir d’un emploi retrouvé. Judicieusement, Raphaël Liogier démontre que cette espérance frustrée n’a plus lieu d’être. « Le droit au travail est un droit transitoire qui doit s’effacer devant le droit de l’homme plus essentiel d’agir, de créer et de produire librement » écrit-il.

Dès lors « L’enjeu n’est rien de moins que l’accession à un nouveau stade d’organisation économique, sociale et politique s’appuyant sur une économie d’abondance. C’est-à-dire sur une économie dans laquelle les biens et services de base et ceux qui relèvent du confort objectif seront accessibles à tous sans que l’on ait préalablement à vendre sa force de travail ».

Un revenu d’existence de haut niveau

Pour y parvenir, l’auteur propose d’amorcer un changement systémique en s’appuyant sur trois principes. Le premier est d’instituer un revenu d’existence de haut niveau octroyé sans condition à tous les citoyens. « De cette façon, les individus quelles que soient leurs origines économiques et sociales, peuvent participer à la vie collective. Ils peuvent être actifs dans une multitude de domaines, avec ou sans revenus supplémentaires. Raphaël Liogier bâtit cette hypothèse sur le fait qu’il est possible de « passer de l’illusion délétère du plein emploi à la réalité productive de la pleine activité ».

Sortir du capitalisme

Second principe, l’auteur estime qu’un « impôt progressif sur le patrimoine global des individus » remplacerait avantageusement l’impôt sur le revenu. « L’impôt sur le capital, qui induit la flexibilité par le haut, financerait le revenu d’existence, qui induit la flexibilité par le bas ». S'attaquer ainsi à la rente du capital serait, à n'en pas douter, le point le plus délicat à mettre en oeuvre...

Troisième et dernier principe, la solidarité sociale et le développement durable s’appuierait sur la consommation par le biais d’une TVA sociale et écologique et non plus sur les contributions des salariés. « Elle permettrait de piloter l’économie vers des orientations durables, en rendant plus chers certains produits préjudiciables à l’environnement et en rendant moins chers d’autres produits plus écologiques ».

Un projet de rénovation pour l'Europe

Raphaël Liogier estime que ce changement de paradigme pourrait s'appliquer idéalement à l'Europe qui aurait là matière à un vaste chantier de rénovation : « Une Europe non retranchée sur la nostalgie de son impérialisme passé, qui en finirait avec sa fièvre populiste, et avec son angoisse collective d'être encerclée et dépassée par les "autres". L'Europe pourrait devenir le laboratoire de la plus grande transistion économique et sociale depuis le néolithique ».

Utopie ou pas ?

« L’homme est un animal démonstratif qui cherche toujours à se distinguer, à raconter sa distinction. Si les biens de première nécessité et de confort matériel ne sont plus objet de distinction, ou plus autant qu’avant parce qu’ils sont universellement disponibles, les hommes chercheront à se distinguer à un autre niveau. C’est déjà le cas d’ailleurs. A un niveau plus créatif, scientifique, intellectuel, artistique. La paresse est l’autre nom de l’ennui et de l’encasernement dans des tâches indésirables. Très exactement ce qui nous guette aujourd’hui si nous ne changeons pas de système ».

 

Le changement de paradigme de Raphaël Liogier semble une douce utopie dans la mesure où il s’attaque aux fondements du capitalisme. Il n’empêche. « Le portrait de cet homme moderne accompli est en train de s’esquisser sous nos yeux » estime l’auteur qui conclut de façon très réaliste : "L’accouchement est difficile. Et il pourrait même échouer". A moins qu'il ne s'impose par la force des choses !

 

Sans emploi, condition de l’homme postindustriel, par Raphaël Liogier

Editions : Liens Qui Libèrent

Prix : 18,50 €

 

Plus d’infos :

https://editionslesliensquiliberent-blog.fr/liogier/

 

Pour aller plus loin :

Crise du capitalisme : André Gortz avait tout compris

 

 

 

 

 

 

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