Insolite : les rochers sculptés de Rothéneuf
L’œuvre monumentale que l’on doit à l’abbé Fouré, sur la côte d’Emeraude à la sortie de Saint-Malo, est celle d’un artiste visionnaire hors norme.
Armé de son marteau et de son burin, l’abbé Fouré arpente les falaises bretonnes de Rothéneuf, l’esprit plein de chimères et d’animaux aux formes étranges qu’il n’a de cesse de matérialiser en sculptures. Sa matière brute, ce sont les roches granitiques qui affleurent le long de la côte, sur le sentier littoral qui longe la commune de Saint-Malo. Son œuvre, monumentale, ce sont ces sculptures taillées à même la roche qu’il a laissées à la postérité, dans ce décor naturel qui l’a tant inspiré.
Une vocation tardive
L’abbé Fouré est demeuré une légende dans la région. Peu connu du monde de l’art, cet ecclésiastique autodidacte s’est forgé un destin hors du commun à la force du poignet. Né en 1839, Adolphe Julien Fouéré est ordonné prêtre en 1863. Il prend alors le nom d’abbé Fouré, un sacerdoce qui durera plus de trente ans, avant qu’il ne se retire à Rothéneuf pour des raisons de santé. Pour se distraire, il se lance alors dans la sculpture, inspiré par les rochers de la côte. A partir de là, sa vie va s’en trouver transformée.
Une figure de l’art brut
Pendant près de quatorze ans, guidé par une sorte de frénésie qu’il nourrit de l’actualité locale, il va sculpter plus de 300 statues sur les falaises de Rhothéneuf. Têtes de géants, figures de saints bretons, animaux fabuleux, ces œuvres d’art brut étaient ensuite peintes. De ces couleurs, il ne reste rien, la mer, le vent, les tempêtes ayant tout effacé. Mal perçue par la population locale à ses débuts, la personnalité fantasque de l’abbé Fouré dérange. Mais porté par ses pulsions créatrices, l’homme persévère et acquiert une réputation d’artiste original jusqu’à sa mort, en 1910. Ses œuvres attirent près de quarante mille visiteurs par an, au point que le site s’en trouve depuis plusieurs années fragilisé.